La justice soupçonne des sénateurs UMP de détournements de fonds publicsEnquête. Le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire sur des faits de possibles détournements de fonds publics opérés au profit de plusieurs sénateurs UMP. Les soupçons portent sur près de 400 000 € ponctionnés dans les caisses du Sénat.
Stéphane Sellami | Publié le 20.05.2014, 07h32
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La justice enquête sur de possibles détournements de fonds au profit de plusieurs sénateurs UMP. | François Guillot
Parmi les rangs des sénateurs, l'information n'avait pas jusqu'ici fuité, mais elle risque de se répandre rapidement avec l'audition probable de plusieurs d'entre eux. Selon nos informations, le parquet de Paris vient d'ouvrir une information judiciaire pour des faits de « détournements de fonds publics », « abus de confiance » et « blanchiment ».
Une instruction confiée au juge René Cros et qui fait suite à une enquête préliminaire de plusieurs mois menée par les policiers de la brigade de répression de la délinquance astucieuse (BRDA).
Au coeur de cette affaire apparaissent deux associations de loi 1901, l'Union républicaine du Sénat (URS) et le Cercle de réflexion et d'études sur les problèmes internationaux (Crespi). Selon les premières investigations, l'URS, dont le siège est situé à Saint-Valérien (Yonne), a perçu des fonds de la part du groupe UMP du Sénat, versés par la questure de la chambre haute, avant de les rétrocéder à ses membres... Les détournements de fonds pourraient s'élever à près de 400 000 €, en l'espace de deux ans.
Désigné comme le donneur d'ordre de plusieurs versements suspects, Jean-Claude Carle, sénateur UMP de Haute-Savoie et trésorier du groupe, a été auditionné librement par les enquêteurs au mois de septembre 2013 .
Les policiers de la BRDA ont été chargés d'enquêter sur cette affaire après un signalement de la cellule de lutte antiblanchiment Tracfin.
Rembourser des frais de relations publiques
« Ce service avait adressé, au mois de juin 2012, un rapport au procureur de la République de Paris, après avoir repéré des flux financiers suspects entre les comptes de l'URS et ceux du Crespi, révèle un proche de l'affaire. Entre les mois de décembre 2009 et mars 2012, l'URS a édité plusieurs chèques à destination d'une trentaine des 130 représentants UMP au Sénat pour un montant avoisinant les 210 000 €. Sur la même période, un virement de 70 000 € a également été effectué par l'URS au profit du Crespi. Les comptes de l'Union républicaine du Sénat ont aussi été débités de près de 113 000 € en espèces. »
Par la suite, près de 60 000 € ont encore été retirés, toujours en espèces, des comptes du Crespi. Des fonds qui auraient ensuite été remis, en partie, à Jean-Claude Carle.
Toujours selon nos informations, ces sommes issues du budget du palais du Luxembourg auraient notamment servi à rembourser les frais de relations publiques des sénateurs UMP, membres de l'URS, au cours de différentes élections.
Par ailleurs, les enquêteurs de la BRDA ont également établi que plusieurs chèques débités sur les comptes de l'URS avaient été émis sur instruction de Jean-Claude Carle, qui en aurait aussi signé plusieurs, alors qu'il n'en avait pas la possibilité.
Au cours de son audition, le sénateur, âgé de 65 ans, également vice-président de la chambre haute, a reconnu avoir paraphé une quarantaine de chèques, « pensant détenir une délégation de signature » en tant que trésorier du groupe UMP, et a nié « avoir perçu des espèces ». Les investigations se poursuivent.
Sollicité lundi, Jean-Claude Carle a confirmé avoir été « auditionné librement » au mois de septembre 2013 par les policiers de la BRDA. « Ils voulaient connaître la nature des relations entre le groupe UMP du Sénat et l'association de l'Union républicaine du Sénat (URS), qui regroupe une soixantaine de sénateurs issus des rangs des anciens Républicains indépendants (RI) et centristes, précise l'élu. Au sein de l'URS, nous nous réunissons à trois ou quatre reprises dans l'année pour débattre de différents problèmes politiques et d'actualité. L'URS n'a aucun lien avec le Crespi, qui émane de la mouvance centriste. Je ne me souviens pas avoir signé de chèques au titre de l'URS. Cette association ne verse pas non plus d'argent à ses membres. En tout cas, pas à ma connaissance. Les enquêteurs m'ont effectivement posé la question de savoir si j'avais touché de l'argent du Crespi. Je n'en ai jamais reçu. »
Le Parisien
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